Les préjugés dans les politiques publiques

Des études québécoises et internationales montrent que les préjugés à l’égard des personnes en situation de pauvreté sont très répandus au sein de la population générale. En plus de leurs effets négatifs au plan individuel, tels que des sentiments de honte, d’injustice et d’auto-stigmatisation, les préjugés peuvent conduire à de la discrimination et à de l’exclusion.

Les préjugés exerceraient aussi une influence au plan structurel. D’une part, les préjugés feraient en sorte que la population générale serait moins encline à soutenir des politiques publiques plus équitables de redistribution de la richesse. D’autre part, la manière dont les politiques sont formulées et présentées à la population contribuerait à nourrir les préjugés à l’égard des personnes en situation de pauvreté. Ces constats demeurent jusqu’à présent peu appuyés empiriquement, car une analyse rigoureuse des politiques publiques sous l’angle des préjugés reste à faire. Comme les politiques publiques sont l’un des instruments les plus puissants dont dispose l’État pour distribuer les ressources de manière à réduire considérablement la pauvreté, il est essentiel de pallier ces lacunes.

Objectifs et méthodologie

Les objectifs

Le projet poursuivra cinq objectifs spécifiques :

  1. Décrire les préjugés présents dans les politiques publiques retenues ainsi que dans les messages publics entourant ces politiques et leurs conséquences pour les personnes en situation de pauvreté.
  2. Documenter l’implication des personnes en situation de pauvreté dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques retenues.
  3. Identifier les mécanismes par lesquels les préjugés présents dans ces politiques renforcent ceux de la population générale à l’égard des personnes en situation de pauvreté.
  4. Recenser les pratiques prometteuses d’élaboration des politiques publiques qui sont exemptes de préjugés à l’international.
  5. Produire une grille d’indicateurs qui permettra d’apprécier la présence de préjugés à l’endroit des personnes en situation de pauvreté dans les politiques publiques en général ainsi que l’ampleur de l’implication de ces personnes dans leur élaboration.

La méthodologie

Le projet comportera 5 volets:

  1. Analyse qualitative des politiques publiques et des messages publics associés – Les politiques publiques et messages publics analyés en trois étapes. La première sera une codification de la logique générale qui sous-tend chacune des politiques. La seconde étape sera une codification du traitement réservé aux personnes en situation de pauvreté par les politiques. La troisième étape visera à identifier les préjugés présents dans les politiques en croisant les résultats obtenus aux deux premières étapes.
  2. Exploration par sondage des mécanismes d’influence des politiques sur l’opinion publique – Nous procéderons à un sondage auprès d’un échantillon représentatif de la population afin de mieux comprendre comment les caractéristiques des politiques publiques de soutien au revenu et au logement participent au maintien des préjugés à l’égard des personnes en situation de pauvreté. Nous pourrons ainsi vérifier si certaines manières de présenter les politiques permettent de réduire les préjugés de la population envers les personnes qui en bénéficient.
  3. Exploration des pratiques prometteuses à l’international – Après avoir identifié les formulations de politiques qui sont problématiques au Québec en matière de soutien au revenu et au logement (volet 1), nous interrogerons des informateurs-clés à l’international, afin de comprendre en quoi leurs formulations diffèrent des nôtres au plan de la désignation des publics-cibles, des bénéfices et contraintes qui leurs sont attribués et des justifications apportées.
  4. Production et validation d’une grille d’indicateurs – Sur la base des travaux menés dans les phases précédentes et de rencontres de délibération en équipe (croisement des savoirs expérientiels, professionnels et scientifiques), nous produirons une première liste d’indicateurs révélateurs de préjugés dans les politiques publiques. Cette liste sera soumise à l’évaluation de chercheur.e.s, d’organismes de défense des droits, de personnes en situation de pauvreté et de fonctionnaires. En guise de pré-test et afin de confirmer la validité des indicateurs qu’elle comporte, la grille sera ensuite appliquée à deux autres politiques publiques. Finalement, en fonction des résultats obtenus au pré-test, nous ajusterons la grille et nous en produirons une version finale qui sera accompagnée d’un guide d’utilisation à l’intention des fonctionnaires et des organismes de défense des droits.
  5. Mobilisation des connaissances – Nous organiserons des activités visant à diffuser les connaissances créées dans le cadre du projet:
  • Organisation d’une journée débat en collaboration avec l’Institut Santé et Société (ISS) de l’UQAM
  • Production et diffusion de documents vulgarisés à l’intention des différents publics cibles.
  • Production de courtes capsules vidéo
  • Organisation d’un webinaire ou d’une formation en ligne à l’intention des fonctionnaires
Les retombées attendues

Le projet produira, à terme, une grille d’indicateurs de préjugés à l’égard des personnes en situation de pauvreté qui pourra être mobilisér pour analyser les politiques publiques. Assortie d’un guide d’utilisation, cette grille pourra être utilisée dans le cadre d’une démarche structurée par les fonctionnaires, les acteurs de santé publique ou les groupes sociaux, afin d’identifier les préjugés présents dans les politiques et suivre leur évolution dans le temps. La grille pourra aider à cibler les améliorations à apporter dans les politiques publiques pour lutter plus efficacement contre la pauvreté.

Par ailleurs, au terme du projet, les politiques actuelles de soutien au revenu et au logement auront été analysées en profondeur et leurs préjugés auront été rendus explicites, ce qui a un potentiel transformateur. Les sondages que nous mènerons auprès de la population générale informeront le gouvernement sur les politiques à prioriser pour lutter contre la pauvreté sans encourager les préjugés. Nous pourrons inspirer les acteurs responsables de l’élaboration des politiques publiques à partir de notre exploration des pratiques prometteuses à l’international.

État d'avancement des travaux

Analyse qualitative des politiques publiques et des messages publics associés – À venir (septembre 2023 à août 2025)

Exploration par sondage des mécanismes d’influence des politiques sur l’opinion publique – À venir (septembre 2024 à août 2025)

Exploration des pratiques prometteuses à l’international – À venir (mai à août 2025)

Production et validation d’une grille d’indicateurs – À venir (septembre 2025 à février 2026)

Mobilisation des connaissances – À venir (septembre 2025 à mai 2026)

Équipe de recherche

Chercheur.e.s

Janie Houle – Chercheure principale
Psychologue communautaire
Professeure, Département de psychologie, UQÀM | Chercheure, Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal

Carole Clavier
Politicologue
Professeure, Département de science politique, UQÀM | Chercheure, Institut Santé et société

Normand Landry
Professeur, Département Sciences humaines, Lettres et Communication, TÉLUQ | Titulaire, Chaire de recherche du Canada en éducation aux médias et droits humains.

Jean-Marc Fontan
Sociologue
Professeur, Département de sociologie, UQÀM | Chercheur, Centre de recherche sur les innovations sociales, UQÀM

Allison Harrel
Politicologue
Professeure, Département de science politique, UQÀM | Chercheure, Canadian Institute for Advanced Research

Olivier Jacques
Politicologue
Professeur adjoint, Département de gestion, d’évaluation et de politiques de santé, UdeM | Chercheur, Centre de recherche en santé publique

Marie-France Raynault
Médecin spécialiste en santé communautaire et santé publique
Professeure émérite, Département de médecine sociale et préventive, École de santé publique, UdeM | Directrice, Centre de recherche Léa-Roback sur les inégalités sociales de santé de Montréal

Personnel de recherche

Hélène Gaudreau
Agente de recherche, Département de psychologie, UQÀM

Jacob Castonguay
Auxiliaire de recherche, Département de psychologie, UQÀM

Gabrielle Lafontaine
Auxiliaire de recherche, Département de psychologie, Université de Sherbrooke

Éric Audet
Auxiliaire de recherche, Département de psychologie, UQÀM

Pair.e.s chercheur.e.s

Neuf pair.e.s chercheur.e.s

Partenaires

Marie-Josée Dupuis
Responsable de la recherche, Collectif pour un Québec sans pauvreté

Berenger Benteux
Chercheur communautaire, ATD-Quart-Monde

Marianne Corneau
Direction régionale de santé publique de la Capitale Nationale

Audrey Hébert
Porte-parole, Front commun des personnes assistées sociales du Québec

Marie-José Corriveau
Coordonatrice, Front d’action populaire en réaménagement urbain

Robert Pilon
Coordonnateur, Fédération des locataires en HLM du Québec

Isaïe-Nicolas Dubois Sénéchal
Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec

Benoît Allard
Co-coordonnateur du volet recherche, Groupe de recherche et de formation sur la pauvreté au Québec

Diane Harvey
Directrice générale, Association québécoise pour la réadaptation psychosociale

Grégoire Autin
Coordonateur de la recherche, Parole d’excluEs

Publications

À venir.

Financement

Fonds de recherche du Québec – Société et culture (FRQSC) en partenariat avec le ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), 217 550$